Lire la tribune sur le site de Médiapart : Assassinat de Pierre Alessandri : le silence assourdissant de l’Etat doit cesser | Le Club
Deux mois après l’assassinat de Pierre Alessandri, paysan, syndicaliste et secrétaire général de Via Campagnola, dans sa ferme en Corse, l’évènement tragique n’a toujours pas provoqué de réaction publique. La Confédération paysanne, la CGT, la FSU, le Modef, le syndicat Simples et l’Union syndicale Solidaires réclament un sursaut politique.
Pierre Alessandri, paysan, syndicaliste et secrétaire général de Via Campagnola, syndicat membre de la Confédération paysanne, est mort assassiné de deux balles dans le dos le 17 mars dernier sur sa ferme en Corse. Nous pensons à sa famille et à ses proches, à nos collègues corses, nous leur présentons nos condoléances et tout notre soutien.
Les multiples engagements de Pierre Alessandri, depuis plus de 20 ans, pour la défense du foncier agricole et de l’agriculture, ainsi que ses positions fermes et courageuses, sont connus de toutes et tous en Corse. Il réclamait un système agricole juste pour tous les agriculteur·rices corses et avait déjà subi un incendie criminel sur sa ferme en 2019. Le procureur de l’époque déclarait alors que « la piste privilégiée est celle d’une réaction violente liée aux positions syndicales » de Pierre Alessandri.
Cet assassinat intervient peu de temps après des déclarations fortes, pour la défense des terres agricoles en Corse, de la part de Via Campagnola et de la sienne. C’est donc bien le syndicaliste, le camarade militant, qui a été tué.
Le meurtre d’un syndicaliste sur le territoire français est un événement dramatique dont nous devons tous et toutes mesurer l’ampleur.
Au regard de cette tragédie et de cette vie d’engagement syndical pour l’intérêt général et collectif, nous sommes profondément indignés du silence assourdissant du gouvernement et des plus hauts responsables politiques et agricoles, à l’annonce de sa mort et depuis maintenant 2 mois.
Notre démocratie est-elle à ce point malade pour que nos plus hauts dirigeants ne trouvent pas le courage de porter une parole publique quand un syndicaliste est tué ?
Nos dirigeants ne sont-ils plus en capacité de reconnaitre le coup porté à notre démocratie ? L’absence de paroles publiques laisse la place à l’impunité, aux oppressions, à la violence, à l’injustice et contribue, de façon irresponsable, à faire reculer partout la démocratie.
En conséquence, nous exigeons que l’enquête progresse rapidement sur les circonstances et les responsables de cet assassinat. Nous refusons que l’escalade de violences et cet assassinat restent sans réponse.
Nous exigeons que l’Etat s’engage pour lutter contre toutes les violences qui gangrènent le monde agricole, les territoires ruraux et notre société, en Corse et ailleurs. Nous refusons le lieu commun d’un « particularisme corse ».
Chacune et chacun, en responsabilité politique, doit aujourd’hui agir contre toutes les violences et injustices subies par les syndicalistes et paysan·nes. Celles et ceux qui produisent de l’alimentation et prennent soin de la terre doivent être protégés et non harcelés, réprimés ou assassinés.
Sans justice, il est impossible de garantir un avenir serein aux nouvelles générations de paysan·nes et travailleur·euses de la terre.
Nous demandons donc un réel sursaut politique et démocratique, pour enfin sortir des logiques d’aveuglement et du manque de courage devant les tragédies en cours et à venir.
Il est urgent que l’Etat et les responsables politiques prennent toute la mesure de leur responsabilité, pour que l’Etat de droit, la justice, ne soit pas que des mots ou des concepts mais bien une réalité sur tout le territoire.
Nous ne laisserons pas les intimidations infléchir notre détermination à militer pour un monde plus juste, nous ne nous tairons pas face à la force, la terreur et les intérêts puissants.
Nous saluons l’engagement, le courage de Pierre et de Via Campagnola. Nos syndicats et organisations réaffirmons notre détermination à poursuivre les luttes pour l’agriculture, la défense des terres agricoles et la justice. La lutte pour défendre les droits des paysan·nes et des syndicalistes est une lutte sociétale et nous serons nombreuses et nombreux à la mener, unis contre les violences.
Signataires : Confédération paysanne, CGT, FSU, Modef, Syndicat Simples Union syndicale Solidaires.